“Eze ! Il faut que tu arrives à faire certaines choses de toi même. Je ne serai pas toujours là. Imagine si je voyage pendant un bon moment”.

Finalement ma partenaire de lutte a fait un long voyage par surprise. Et malgré mon espoir, mes larmes, ma tristesse elle ne reviendra plus. La vie est ainsi faite.

Je ne saisis pas ces lignes pour raviver les moments douloureux. Non ! Mais pour des beaux souvenirs, ses sages paroles qui me chérissent jours et nuits.

Cher lecteur, nous sommes tous des étrangers sur cette terre et un jour viendra où nous allons répondre à l’appel de notre créateur. Il n’y a pas d’âge pour répondre à cet appel. Nous savons tous comment l’être humain vient au monde, mais dans quelles circonstances il repartira auprès de son créateur, nul ne sait.

Ma mère m’a appris que le physique est juste une coquille que Dieu nous a prêté pour notre séjour sur cette terre.Un jour viendra où nous allons le rendre. J’étais assis seul devant la cour, elle (ma mère) est sortie me trouver et me demanda pourquoi je ne me joignais pas aux jeunes qui étaient de l’autre côté. Je répondis : « Je ne suis pas comme eux ». C’était l’époque où je peinais à me réconcilier avec mon corps. Je ne l’aimais pas vraiment. Elle m’a fait comprendre que la paralysie ne me diminue en rien, et ne me définit pas. Elle ajouta : « tu sais faire certaines choses que même les personnes valides ne peuvent pas faire ». Elle m’a beaucoup encouragé avant de rentrer.

Alors toi qui me lis, comment vois-tu ton physique ? De nos jours beaucoup dépenses de fortes sommes dans leur physique juste pour paraître. Te laisses tu entraîner par cette tendance ? As-tu honte de ton physique ? Caches tu tes défauts corporels ? Envies tu ceux qui se disent qu’ils ont un physique de rêve ?

J’ai appris une chose, plus tu caches tes défauts corporels, plus tu as honte de ton physique…plus tu t’isoles, et petit à petit tu empruntes le couloir du bas fond. Difficile de remonter la pente en ce moment. Quand j’ai été amputé, j’ai décidé de ne pas me cacher. D’ailleurs j’avais fait la réconciliation avec mon corps. Autres choses qui m’ont aidé, je suis toujours torse nu, quand je suis à la maison malgré que je sois maigrichon (rire). Ce qui fait que beaucoup de personnes ne font plus attention à mon physique, mais à la personne que je suis.

Avec ma mère j’ai appris à pleurer et à essuyer mes larmes. Plusieurs fois elle a pleuré avec moi en essuyant mes larmes en me disant: c’est Dieu qui a le dernier mot. Tu as traversé de pire situation, tu es courageux…et très souvent elle prie. Quand le fixateur externe (fer fixé sur mon tibia et le fémur maintenant le pied) m’a lâché quelques semaines après l’opération, le médecin venu pour faire le constat m’a informé que ma mère était en larmes dehors. Je lui ai demandé de l’appeler. Elle est rentrée. Je voyais ses larmes. Je lui ai dit que j’allais bien. De sécher ses larmes comme elle m’a appris.

Souvent nous faisons face à des situations qui nous dépassent. On fait des calculs dans la tête, on trace plusieurs scénarios…mais sans solution. Oh oui! C’est la vie. Elle est ainsi faite.

Dans pareil situations, pleure si tu ressens le besoin, relâche un soupir…il n’y a pas de honte à cela. Dieu comprend le langage des larmes. Tiens bon. Peu importe la durée,

Il frayera une porte de sortie pour toi. Il est le spécialiste des cas impossibles. Il a le bon timing. Il l’a fait plusieurs fois pour moi, il le fera certainement pour toi. Il n’a pas changé. Il est fidèle.

Avec ma mère j’ai appris l’amour du prochain, pardonner et demander pardon.

Plusieurs fois nous disons, maman tu en fait trop. Elle répond toujours, toute personne qui entre dans cette cour doit avoir à manger et à boire. Trier vos habits que vous ne portez plus. Il y a des gens qui en ont besoin.

On se plaint d’une personne, elle nous répond, les propos de la personne, ou ce que la personne a fait, ça enlève quoi à ta personne ? Continue ton chemin. Elle se fâche rarement et même quand elle se fâche, c’est pour un bout de temps. Elle a tort ou pas, elle fait la paix.

Toi qui me lis, que fais-tu pour le bien être de ton prochain ? Est-ce que tu pardonnes et demande pardon en retour ? Ça ne sert à rien d’aller sur la tombe de ton prochain pour lui demander pardon, ou pardonner. La tombe est muette. Demander pardon est important. Pardonner est super important. Comme on le dit : « on ne pardonne pas parce que l’autre mérite, mais pour être en paix avec soi- même ».

Avec ma mère j’ai appris que je suis le premier responsable des situations auxquelles je fais face et auxquelles je ferai face. Je dois les assumer.

Elle m’a appris qu’en face d’une situation, les gens seront là, mais pour combien de temps ? Cela m’a énormément aidé après son départ. J’essaie d’aller de l’avant tant bien que mal. Ce n’est pas l’envie d’envoyer tout paître qui manque, je me souviens chaque jour des efforts, son amour débordant envers moi et ça me donne des ailes.

J’avais décidé de ne plus écrire d’articles. C’est mon neveu Pierre. C qui m’a encouragé à continuer. Il a réglé la facture du site web. Je me souviens de ses mots avec la photo du reçu de paiement : “Mon oncle on a pour une année”.

J’ai demandé à Dieu pourquoi il m’a privé de ma mère ? Plusieurs questions ont envahi mes pensées. J’étais déboussolé. Comme elle m’a appris, personne ne doit voir tes larmes Ezé. Sur ma couche mes larmes coulent. Tout ce que je peux dire, c’est : « eh Dieu, eh Dieu ».

Un collègue à mon père a pris un temps de discussion avec moi. Ses paroles m’ont fait du bien. J’ai eu une autre lecture de la situation. Je me suis dit : Est-ce que nous allons en supporter les conséquences ? En terme plus clair, est-ce que nous allons supporter les séquelles ? Moi particulièrement je n’allais pas supporter de voir ma mère dans un autre état. J’ai conclu que Dieu sait ce qu’il fait. Il n’a pas de compte à rendre à personne. Il est souverain. Très souvent on boude Dieu quand on est dépassé par les évènements. On se dit que Dieu fait la sourde oreille. D’autres vont jusqu’à dire qu’il n’est pas amour. Ce n’est pas facile c’est vrai. On est humain. c’est normal que notre centre d’émotion (âme) réagisse. Mais la douleur ne doit pas nous amener à prononcer des paroles pas “catholiques” envers Dieu. Dans La Bible, Job tellement épris de douleur à maudit son jour de naissance et va même jusqu’à dire que même si Dieu le guérissait il ne croirait pas.

 Elie a demandé la mort parce qu’il fut dépassé par les événements. Il y a plein d’autres exemples des faiblesses des héros de la Bible que Dieu expose. Juste pour nous faire comprendre que nous sommes ses créatures et il nous connaît très bien.

 Nous devons tout simplement lui demander son secours. Lui demander de nous aider à accepter sa volonté, lui obéir.

Je termine par ces lignes…

Les mois se sont écoulés, la douleur est là. Chacun a sa manière de faire son deuil comme on le dit. Nous rendrons grâce à Dieu pour ses bienfaits, pour sa consolation. Nous avançons en nous appuyant sur l’Eternel Dieu. Nous comptons sur ses bontés qui se renouvellent envers nous chaque matin. Le vide est grand, mais l’auteur du vide saura le combler.

Le capitaine (mon père) est resté un vrai capitaine. Un vrai homme. “La machine a pris de l’eau mais jamais le navire a coulé”.  Nous savons que c’est très dur pour lui. La complicité qu’il avait avec ma mère était très forte. Mon père disait que durant les 40 ans de leurs vie passées ensemble, c’est une seule fois ils se sont disputé. Et là aussi c’était parce qu’il n’était pas allé saluer le décès d’un oncle maternel au village.

Mon père ne connaît pas de couturier. C’est ma mère qui choisit les tissus et les envoie chez le couturier.

Ils nous ont raconté comment ils ont créé leur association pour le secours et l’aide à l’orphelin. Au début, chaque fin du mois, ils prélevaient de leur salaire pour payer du lait et donner à quelques orphelins dans les villages.

Ils ont accueilli plusieurs personnes à la maison. Il y en avait d’autres qui avaient des problèmes mentaux. Ma mère veillait à ce qu’ils aient à manger et mon père priait pour eux.

Ma prière est que Dieu le fortifie davantage, et lui accorde beaucoup d’années à vivre. Qu’il puisse voire ma réussite et se réjouir. Je sais que mon avenir est super beau entre les mains de Dieu. Rien, ni personne ne peut m’a arraché entre ses mains.

J’admire le courage de mon petit frère et mes sœurs. Souvent si un de nous a besoin de quelque chose que nous ne pouvons pas lui offrir, on se taquine en disant : « ce n’est pas pour un orphelin ce genre de chose, ou n’oublie pas que tu es orphelin” (Rire) ». On se remonte le moral, on s’encourage.

Quant à moi, j’essaie d’aller de l’avant. J’ai réalisé que la vie est faite de haut et de bas. J’ai réalisé que je dois me battre pour me faire une place dans la société. Oh oui ! Elle a forgé l’homme que je suis aujourd’hui. Durant 17 ans elle est restée auprès de moi. Elle n’a jamais effectué un voyage de plus d’une semaine.

Je me souviens encore de cette soirée où j’ai fini le pansement et j’étais assis adosser au mur, mon ordinateur en main. Elle était surprise. Parce que plusieurs fois elle me disait de prendre l’ordinateur et de faire quelque chose. Mais moi je ne voulais pas. Ce jour-là j’ai senti de la joie sur son visage. La même soirée, elle remerciait Dieu pendant la prière de notre cellule.

Chaque fois c’était : Eze ! Tu peux faire plein de choses avec ton ordinateur. Nous allons construire une maisonnette où tu vas commencer une imprimerie.

Avec le temps, j’ai compris qu’elle voulait que je sois indépendant.

En juillet, j’ai commencé à personnaliser des t-shirts pour vendre. Je fais aussi la conception de tout ce qui est support visuel numérique. Je suis content de ce que je fais. Je ne passe plus mon temps au lit du matin au soir sans rien faire. Il arrive que je regrette de n’avoir pas commencé les conceptions quand elle m’encourageait dans ce sens. Mais bon, l’obéissance vaut mieux que les sacrifices (rire). Ma prière est que Dieu bénisse et fasse prospérer ce que je fais comme travail. Petit à petit, la chenille volera certainement. J’aimerai un jour dire : « j’ai réussi le projet que j’avais avec ma partenaire de lutte ».

La vie ne vaut rien et rien ne vaut la vie, aimons nous dire. Si seulement chacun de nous pouvait vraiment saisir la profondeur de cette phrase, le monde serait meilleur. Mais hélas ! L’amour du prochain a refroidi. C’est devenu chacun pour soi, Dieu pour tous. Cultivons l’amour autour de nous. Donnons l’exemple aux enfants de bas âges.

La vie c’est l’amour. Rien de plus !

A travers ces lignes j’aimerais remercier tous ceux qui nous ont soutenu pendant l’épreuve douloureuses que nous avons traversée. Ma prière est que Dieu vous bénisse et vous fasse du bien.

Cher lecteur, vivre sur cette terre et partir n’est pas du tout facile. Alors pourquoi ne pas s’aimer ? Pourquoi ne pas s’entraider ?

La vie c’est l’amour. Rien de plus !

#DemeurezBenis